Deux cents ans d’histoire
Texte écrit par
Julien Poulhès de Cantoinet


Les Bonnan
Nos ancêtres aux Capelles s’appelaient Bonnan. J’ai trouvé un Pierre Bonnan qui fit son testament en 1782. Il avait épousé en 1712 Anne Chaudes-Aigues de Vignes d’Orlhaguet. Puis un Jean Bonnan qui avait épousé Marie Constant mais là, je n’ai aucune date.
Le dernier des Bonnan était encore un Jean né en 1744 et mort en 1819. Il avait épousé Cécile Cambournac de la Calmette (1748-1856). Ce sont eux qui avaient fait construire la maison actuelle. La date de construction gravée sur la porte d’entrée est 1783. A cette date ce Jean Bonnan avait trente-neuf ans. Ils ne durent avoir que deux filles : Marie-Jeanne, née en 1782 et décédée en 1847, alla à Cayrac épouser Jean-Antoine Vernier et eut probablement cinq enfants, trois filles et deux garçons.


Les Prat
Celle qui resta à la maison paternelle aux Capelles, Marie-Anne épousa un Prat de Plagnes mais n’eut pas d’enfant. Ce Prat aux Capelles doit avoir joué un certain rôle dans la paroisse. Il a été parrain de la grosse cloche, son nom Laurent Prat est gravé sur la cloche. D’après ce que j’ai cru comprendre sur un vieux papier, que j’ai vu aux Capelles, il doit avoir été l’artisan du changement de presbytère qui était autrefois à la maison occupée maintenant par la famille Dandrieu, mais le vieux papier dont je cause est difficilement lisible.

Le ménage Prat aux Capelles prit à son service une de leurs nièces de Cayrac avec l’intention de la faire héritière. Cette nièce, Antoinette, vint à mourir aux Capelles à 22 ans, avant son oncle et sa tante. Ce décès est marqué sur les registres paroissiaux de Cantoin. Les Prat prirent ensuite une petite nièce
Victoire Clergues, et c’est ma grand’mère.

C’est donc Victoire Clergues qui est héritière de sa grand-tante Marie-Anne épouse Prat aux Capelles. L’oncle et la tante moururent tous les deux en 1864, Victoire avait 20 ans et se trouvait seule aux Capelles.

Etienne Poulhès
C’est alors que le curé de Cantoin , un Joanny (originaire de Vines, sobriquet de la maison Mourette) qui était curé à Nigressère avant d’être nommé à Cantoin, alla chercher un de ses anciens paroissiens de Nigressère, Etienne Poulhès pour le présenter à l’héritière des Capelles et il fut accepté. Le mariage eut lieu à Cantoin en 1865. C’est ainsi que le nom de Poulhès est arrivé aux Capelles.


Jean-Marie
Les enfants ne tardèrent pas à venir égayer le ménage,
Jean-Marie, (mon père), naquit en 1866 et il en naquit onze pendant 20 ans, à peu prés régulièrement, un tous les deux ans. Le cadet qu’on avait baptisé Cyprien mourut à 10 ans et le onzième mourut au berceau. Quand mon père partit au régiment le berceau n’était pas encore rangé. Il y eut encore deux naissances pendant qu’il était au régiment. Il a fait son régiment à Castres dans l’artillerie. Il était parti pour cinq ans mais la loi de trois ans fut votée et il ne fit guère que trois ans. Aussitôt fini son régiment il partit à Paris faire le garçon charbonnier chez sa tante Eugènie Clergues épouse Jean Costes cité Jarris. Non loin de là il y avait rue du paradis un autre charbonnier, un Chastan de Cantoin qui avait avec lui sa fille Marie âgée de 20 ans. Le garçon de la cité Jarris se mit à fréquenter le charbonnier de la rue de Paradis et il demanda la fille en mariage, lequel fut célébré à Cantoin en 1893.

La maman Chastan mourut en cette année 1893 et le papa Chastan céda son commerce de la rue du Paradis à mon père et ma mère. Lui vient se retirer à Cantoin avec son autre fille Julie, six ans plus jeune que sa sœur Marie (ma mère), et il exploite une partie de son petit domaine de Cantoin, l’autre partie reste en location.


Rue du Paradis
Sitôt mariés, mon père et ma mère s’en vont rue du Paradis (mais une anecdote en passant, ils avaient dépensé leur argent au moment du mariage et il ne leur restait pas assez pour faire le voyage; les parents ne s’en rendaient pas compte et eux n’osaient pas le leur dire et mon père va emprunter de l’argent à un voisin, mais quel voisin ! Je tacherai d’en parler...).
Voila donc mes parents installés rue du Paradis; le beau-père avait laissé le tiroir et toutes les étagères garnies. C’est là qu’avec trois de mes sœurs nous avons vu le jour, et vécûmes jusqu’en 1901. A cette date la maison des Capelles est pleine évolution : le
grand père Poulhès mourait en 1900 :
_ Jean-Marie, comme je l’ai dit, était à Paris (1866-1948)
_ Marius avait essayé le séminaire mais n’y était pas resté et avait épousé Julie Chastan la sœur de ma mère; ils exploitaient ce petit domaine de Cantoin mais avec leur beau-père l’entente n’était pas parfaite (1870-1919).
_ Maria était au noviciat des religieuses de la Sainte Famille à Villefranche de Rouergue (1872-1948).
_ François avait fait son service militaire et était avec nous à Paris garçon charbonnier (1875-1948).
_ Virginie était en projet de mariage et en 1902 épousait Baptiste Galdemar de Servières prés de Saint Chèly d’Aubrac(1879-1959).
_ Honoré effectuait son service militaire à Mende (1879-1956)
_ Alphone était au petit séminaire à Espalion et se préparait à rentrer au noviciat des Pères Maristes (société de Marie) pour devenir missionnaire (1882-1963).
_ Paul était à l’école pensionnaire à Camonil (Rodez) où enseignait son oncle Victor le frère de sa mère (1885-1963).
_ Irma à l’école pensionnaire au couvent de Cantoin (1887-1932)

Retour au pays
Comme trente-sept ans plus tôt ma grand-mère se retrouvait souvent seule aux Capelles. C’est alors que mes parents décidèrent de quitter Paris. Ils cédèrent leur commerce à leur frère et sœur Marius et Julie et vinrent exploiter les deux domaines des Capelles et de Cantoin. C’était en novembre 1901.
_
Victoria (1894-1968) avait 7 ans.
_ Julien (1895 )        j’avais 6 ans.
_ Hélène (1897-1976)   avait 4 ans.
_ Marie Louise (1899-1935) avait 2 ans.
Ma mère reste à Cantoin avec son père pour nous permettre d’aller facilement à l’école. Mon père fait souvent le va et vient des Capelles à Cantoin et Honoré vient au monde en 1902 (il devait mourir à 12 ans en 1914) et Albert arrive en 1904.
En 1905 la loi de séparation de l’église et de l’état interdit aux religieuses de faire l’école. Habillées en laïque elles auraient pu continuer à exercer, la Sainte famille ne voulut pas se plier à cette exigence. A Cantoin les religieuses durent donc arrêter de faire l’école. La commune chercha donc un local et une institutrice fut envoyée. Mes parents répugnèrent à ce changement et nous partons tous aux Capelles. Une jeune fille est embauchée pour nous faire l’école à la maison. Le premier hiver c’est une religieuse de Malet qui vint nous instruire (après ces lois de séparation beaucoup de religieuses étaient désemparées) mais ensuite on s’adressait aux écoles de Rodez qui nous envoyaient une jeune fille qui avait échoué au brevet. Chez nous elles pouvaient continuer à se cultiver pour repasser leur examen. L’une d’elle vient deux hivers de suite et une autre trois hivers (Etienne naît en 1907).
C’est donc pendant six hivers que nous étions à l’école aux Capelles, jusqu’en 1911. Moi j’avais 16 ans et on m’envoya passer un hiver en pension à Saint Amans des Cots. Ma sœur Victoria avait 17 ans et c’est elle qui va s’occuper d’instruire ses frères et sœurs et aussi des petits cousins. Mes oncles de Paris envoyaient leurs enfants en nourrice aux Capelles et dès leur plus jeune âge ils commençaient à apprendre à lire. Il faut se rendre compte qu’à l’époque il n’y avait ni cantine ni ramassage scolaire. Il fallait partir à pied, la musette sur le dos pour le repas de midi et les hivers étaient plus enneigés qu’aujourd’hui et pas de chasse neige. Et on peut se rendre compte que la maison était à nouveau pleine, mon grand-père Chastan nous avait suivi aux Capelles et il y avait ma grand-mère Poulhès. Un domestique était souvent embauché pour aider mon père; avec l’institutrice et toute la famille il y avait 14 ou 15 personnes tous les jours à table. Mais en 1914, tout va changer, mon grand-père Chastan est reparti à Cantoin car Marius et Julie ont cédé leur commerce et sont revenus à Cantoin; ma grand-mère meurt en 1913. Mon frère meurt en 1914, il avait 12 ans, mes frères Albert et Etienne en pension à Saint Amans des Cots (Albert avait 10 ans et Etienne 7). Mes sœurs Hélène (17 ans) et Marie-Louise (15 ans) sont en pension à Mur-de-Barrez. Et moi je pars à la guerre en 1915. Victoria, à 20 ans, va prêter main forte à l’oncle Victor, un frère à ma grand-mère dont j’ai déjà parlé (religieux enseignant). Moi parti, mes deux plus jeunes sœurs arrêtent l’école et travaillent à la maison; on ne trouve plus de domestiques, tous les hommes valides de 18 à 45 ans sont mobilisés. Mon père avait 48 ans. Ce n’est qu’en septembre 1919 que tous les hommes sont démobilisés et les mariages ne manquent pas dans le pays. La maison des Capelles n’échappe pas à la règle. Dès l’automne 1919 Victoria épouse son cousin Marius Combres au Baillant. Le père et la mère Combres étaient morts pendant la guerre, la maison était fermée et la vigne en piteux état, Victoria à eu pitié de lui.
En juin 1920, c’est moi qui épouse à Cantoinet Aline Bès. En 1921, Hélène épouse son voisin et petit-cousin Jean Andrieu. Marie Louise attend 1924 pour épouser Calmels d’Espalivet.
Mais c’est à Albert qu’il revient de faire revivre la maison et en 1930, il épouse Octavie Raynal d’Huparlac et cinq enfants naîtront de cette union (Thérèse, Raymond, Angèle, Denise et Jean-Marie).
C’est en 1945 que, retardées par la guerre, on fêtera le noces d’or des grands parents Jean-Marie Poulhès et Marie Chastan, en même temps que le baptême de Jean-Marie le dernier fils d’Albert.